RAPPORT… SUR L’ÉCOLE FRANÇAISE DE JÉRUSALEM
Du debut 1967 à fin janvier 1974
À la demande de certains parents, je vais essayer de relater brièvement ici l’histoire de l’École Française de Jérusalem, c’est à dire de sa fondation et de son évolution.

En 1966, les Soeurs de Saint Joseph de l’Apparition parlèrent de former l’école qu’elles dirigeaient, 66 rue des Prophètes, et qui groupait 250 à 300 enfants arabes, étrangers et israéliens. Leur decisión prit forme et, au debut de 1967, elles nous firent savoir qu’elles termineraient l’année scolaire mais ne rouvriraient pas dans en octubre.

Le souhait de l’éducation de nos enfants devenait réel, car il ne restait plus à Jérusalem d’enseignement en langue française.

Madame Noël (U.N.T.S.O.), Madame André (Consulat de France) et moi-même (Programme de Développement des Nations Unies) sommes réunies pour discuter de ce Nouveau problème. Nous avons tout d’abord essayé de persuader les Soeurs de Saint Joseph de changer leur décisions et de continuer leur école en ayant une section spéciale, avec curriculum français, pour les enfants de langue française. Rien ne put les faire changer d’idée et il a fallu chercher d’autres solutions.

Le 24 avril 1966, Nous sommes donc allées toutes les trois voir Monsieur d’Halloy, Consul Général de France, pour lui parler de nos problèmes. Il nous a reçu très favorablement et nous conseilla de ouvrir nous-mêmes une ”Petite École Française” comme il en existe beaucoup de par le monde.

La “guerre des six jours” arriba et, les frontières n’existant plus, nous espérions trouver une solution plus facile. Notre trio alla d’abord voir, le 8 juillet 1967, les Sœurs de Notre Dame de Sion, [*] l’Ecce Kome, qui avaient une école anglaise d’un excellent renom, car nous espérions obtenir l’ouverture d’une section française. La Mère Aline ne nous a pas reçues et nous ne sommes pas arrivées à persuader son assistante ; les sœurs elles-mêmes songeaient à changer leur orientation et à se lancer au service des pèlerins et des touristes. Nous étions donc revenus à notre point de départ : création d’une école.

Qui en prendrait la tête ? On nous parla alors de Mademoiselle Mathieu qui avait monté une école prospère à Amman, et nous allâmes la consulter. Mademoiselle Mathieu, déjà d’un certain âge, trouva la tâche trop lourde et se récusa.

Cette fois ci nous n’avions plus de choix si nous voulions garder nos enfants et écumer une éducation adéquate ;nous ne pouvions plus reculer.

Grâce à l’aide de l’ambassade de France à Tel Aviv, il nous fut possible de rédiger les statuts de l’École en nous fondant sur le travail que cette Ambassade avait élaboré pour sa propre école.

Le mardi 20 juillet 1967, nous avons eu, au Consulat Général de France, notre première réunions de parents. On expliqua à ceux-ci comment fonctionnaient les Écoles Françaises à l’étranger et le premier Comité de Gestion fut constitué. J’en devins la Présidente, Madame Noël la Trésorière et Madame André la secrétaire.

Notre Comité se mit en aussitôt à l’œuvre. Il fallait :
a- Trouver des locaux.
b- Recruter des enseignantes.
c- S’inscrire au C.N.T.E. , commander livres et cahiers etc…
d- Assurer le fonctionnement de l’École.
e- Lui donner une existence légale, et mille autres choses que nécessite l’ouverture d’une école, si petite soit-elle.

a- Locaux. Après quelques pourparlers, les Sœurs de Saint Joseph acceptèrent de nous louer les 5 classes qui sont maintenant celles du primaire, ainsi que l’utilisation des cours de récréations et des sanitaires. Nous devions, par la suite, ajouter d’autres classes en sous-sol.

b- Enseignantes. Grâce à Monsieur André, nous avons pu bénéficier de la deuxième année du contrat que Mademoiselle Calon, enseignant dans l’École des Sœurs, avait avec le Ministère des Affaires Étrangères. Elle fut engagée le 25 septembre 1967 et devins notre directrice. Avec elle devait travailler deux autres jeunes institutrices qui avaient enseigné, elles aussi, chez les Sœurs. L’équipe était ainsi constitué et l’École ouvrit ses portes le 2 octobre 1967 à 25 enfants de nationalités diverses.

c- C.N.T.E. Le programme des Sœurs n’étant pas conforme aux études françaises, nous avons jugé préférable de nous inscrire au Centre National de Télé-Enseignement (C.N.T.E.).

d- Fonctionnement. N’ayant pas eu de budget d’investissement, nous avons vu les dépenses précéder les rentrées, et Madame Noël, Monsieur André et moi-même avons dû, dans la mesure de nos possibilités, faire des avances de fonds tant en France qu’a Jérusalem : paiements divers, achats de livres, de fournitures, de matériel d’entretien, assurances etc…

Comme nous n’avions pas encore d’existence légale, nous ne pouvions ouvrir un compte bancaire au nom de l’École ; aussi avons-nous dû, Madame Noël et moi, ouvrir un compte-joint à la Banque Barclay. Le démarrage de l’École a été modeste, mais s’est fait sans heurts grâce à la bonne volonté et à la collaboration de chacun.

Monsieur André, Consul de France, nous a aidé à établir notre premier budget avec demandes de subvention et de bourses, et nous avons toujours trouvé près de lui une aide effective bien nécessaire. Il a également, à plusieurs reprises, réglé en France nos factures de livres, qui lui furent ensuite remboursées ici.

Le 22 décembre 1967, une fête autour d’un arbre de Noël terminait ce premier trimestre.

e- Enregistrement de l’École. Dès janvier 1968, j’ai étudié la manière de donner une existance légale à l’École. Suivant les conseils de Monsieur Yeshaya, Préfet du District de Jérusalem, j’ai pu faire enregistrer l’École en tant qu’Association, selon la loi Ottomane qui est encore en vigueur dans certains domaines. Monsieur Cohen, du Consulat de France, nous a apporté son aide en traduisant en hébreu un résumé de nos statuts et en traduisant en français la pièce-clef de notre dossier au Ministère de l’Intérieur. Notre École a donc trouvé son existence légale le 18 septembre 1968 sous le nom de ÉCOLE FRANÇAISE DE JÉRUSALEM.

Je ne veux pas ennuyer le lecteur avec un récit quotidien et fastidieux de l’évolution de l’École, aussi en noterai-je que les principaux aspects :
-L’enseignement,
-Les effectifs,
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-Le matériel,
-Les finances,
-L’Administration et le Comité de Gestion.

1-ENSEIGNEMENT.
Nous avons commencé par l’enseignement primaire, mais le cycle secondaire fut ouvert en septembre 1971 et alla jusqu’à la seconde en 1972-73 et en 73-74. Nous avons renoncé au cours du C.N.T.E. pour le primaire, tout en le conservant dans le secondaire, les séries de cours et les corrigés arrivant directement (mais irrégulièrement) chez les élèves, et les devoirs repartant par la « valise » du Consulat.

Petit à petit nous sommes arrivés à stabiliser l’équipe des enseignants, qui sont avec nous depuis plusieurs années et qui possèdent tous les diplômes ou licences demandés par leur état. L’enseignement donné était un enseignement complet selon les horaires et les curricula français.

Dès 69-70, nous avons organisé des cours d’après-midi pour aider les fanco-israéliens et les étrangers désirant apprendre la langue française. Après avoir commencé par des cours d’enfants, nous avons ensuite ajouté les cours d’adultes ; en septembre 73, nous avions donc deux cours d’enfants (débutants et avancés) et deux cours d’adultes (débutants et avancés).

En septembre 1972, nous avons commencé une classe de jardin d’enfants, dont le nombre était fonction de l’exiguïté de la pièce, c’est-à-dire 11 à 12 au maximum.

En janvier 1974, j’ai mis sur pied un « cours de vendredi » pour pour permettre aux enfants allant aux écoles arabes de venir étudier en français.

Le sport a été notre point faible, mais une des mères de famille a pu sur pied un cours de gymnastique qui fut donné pendant une année au Y.M.C.A.

L’éducation musicale était assuré en dehors des heures de classe par une sœur de St Joseph qui donnait des leçons de piano et de violon. Nous avons eu une seule fois le plaisir de recevoir une pianiste qui nous a donné un concert de piano avec commentaires.

En 1968, nous avons dû prévoir un exposé d’un autre genre et demander à la police de nous montrer ce qu’était une grenade, une mine anti-personnelle etc…, afin de mettre les enfants en garde sur le danger que pouvait, par exemple, représenter un stylomine qui traîne. Les exercices de défense passive avaient lieu tous les ans et une réserve d’eau et de biscuits était gardée dans les classes du sous-sol.

2-EFFECTIFS.
L’effectif de notre École a varié, allant de 25 la première année à 93 en 72-73, pour redescendre à 79 en 73-74 et être brusquement amputé de 38 enfants par le départ des africains dont les pays avaient rompu les relations diplomatiques avec Israël. Nous avons eu jusqu’à 14 nationalités différentes, de religion chrétienne, juive et musulmane ; la politique et la ségrégation n’étaient pas tolérées à l’École, et la période de la guerre du Yom Kippur elle-même s’est passée sans heurts.

La santé des enfants étaient dans nos préocupations au même titre que leurs études et nous avons eu tour à tour des visites médicales, des dépistages de tuberculose etc… En 1972-73, nous avions fait un arrangement avec le Docteur Lichtenstain, par lequel nous assurions à ses deux garçons un enseignement de français dans nos cours d’après-midi, tandis que lui, de son côté ferait passer une visite médicale à tous les enfants de l’École. Une fiche médicale était établie pour chaque enfant, et les parents étaient avertis en cas de soins à faire donner à l’enfant. Je regrette qu’il n’ait pas été jugé utile de continuer cette pratique.

3-Materiel.
Nous avons débuté dans le plus grand dénuement, sans aucune possession. Petit à petit nous avons pu assembler un noyau scolaire important.
a) Matériel pédagogique : Le centre culturel Français ayant fermé en 1570, le directeur Monsieur Lichtarge, nous a très généreusement donné environ 600 livres d’enfants venait de sa bibliothèque. Ils n’étaient pas neufs, mais nous avons été très heureux de les recevoir; nous avons continué à en acheter régulièrement et le consulat de France nous en a donné quelques uns. Il a fallu classer, cataloguer, ficher, numéroter tous ces livre, ce qui a représenté un travail considérable. Melle Mathieu, ancienne institutrice qui devait mourir d’un cancer peu après, nous a beaucoup aidées en copiant une grande partie des fiches. Les livres nécessitant une reliure était envoyés chez les carmélites de Bethléem. Nous avons pu acheter un tourne-disque, des maquettes pour le cour de science, un matériel de laboratoire, un écorché etc… Le consulat de France nous a donné, en 1973par l’intermédiaire de Monsieur Grangier, un squelette de taille adulte et un microscope. Quelque disque nous ont été donnés par Tel-Aviv. Un partie du matériel scientifique a été acheté à Tel-Aviv, l’autre a été ramenée de France dans mes bagages.

b) Mobilier : Le chauffage a été un de nos premiers soucis l’hiver précédent avait été très froid et les petits poêles prêtés par les sœurs s’étaient révélés insuffisants. Nous avons pu acheter quelques gros poêles qu’il a fallu installer en faisant sortir les tuyaux par les fenêtres. Méthode vétuste et aléatoire, à la merci des grands vents, mais, en 1969, c’était le moyen de chauffage le moins coûteux.

L’épidémie de choléra en 1970 nous obligea à refaire les W.C.

En 1971, Notre Dame de France ayant changé de propriétaire Assomptionistes ont eu la bonté de de nous vendre armoires, bureaux etc… à des prix défient toute concurrence. Madame Campenet, Madame Amuah et moi-même, transformées en débardeur et déménageurs, avons, dans nos voitures et sur nos voitures, transporté armoires, meubles, livres, écrans etc… pour éviter des frais supplémentaires de transport et de porteurs. L’achat d’un frigidaire et du réchaud à gaz, de camping, permettent aux professeurs qui le désirent de se faire repas ou boisson chauds ou froids.

c) Matériel administratif : Grâce à un écran donné par le centre Culturel lors de sa fermeture, j’ai pu faire un bureau en cloisonnant une des classes ; ceci m’a permis de travailler sur place et d’effectuer des permanences. Nous avons pu acheter d’occasion une machine à écrire, grand chariot, dotée d’un clavier français, mais elle avait la particularité d’avoir chiffres et majuscules dans opposé à l’ordre habituel. Fous ne pouvions donc nous en servir quotidiennement, sous peine de commettre trop d’erreurs et nous la réservons pour les grands tableaux. Pour le reste des travaux je devais me servir de ma petit Underwood portative. Celle-ci a rendu l’âme au service de l’école et j’ai pu en septembre 75 rapporter de France, dans mais bagage, une autre machine à écrire pour l’école, ainsi qu’une petite machine à calculer.

d) Fournitures : Afin de faciliter le travail, je me suis créé petit à petit, un certain nombre de formulaire : papier à lettre et enveloppes à en tête, fiches d’inscription, certificats de scolarité, factures, reçus de comte-dépôt, carnets scolaires annuel, fiches médicales, etc… Je ramenais de France les timbres destinés aux envois du C.E.T.E et faisais venir de Beyrouth les carnets scolaires primaire et du secondaire. Nos cahiers sont d’abord Beyrouth, mais nous avons pu, l’été dernier, profiter de la « valise-bateau » du Consulat pour faire venir livres, cahier, papier millimétré etc…dont il nous reste tout le stock. Les arrivages de livres pas avion ont créé bien des problèmes ; ils arrivée en retard ou étaient accueillis par des grève à l’arrivée à Lod. Madame Campenet et moi avons passé des journées entières à chercher nos paquets dans tous les entrepôts de Tel-Aviv ; ils y étaient dirigés sans qu’un catalogue indiquât leur destination temporaire.

4-Les FINANCES
Nous avons commencé sans centime, le cahier de compte a porté des dépenses avant qu’il fut question de rentrées, mais grâce à petite subvention du gouvernement français et au travail volontaire du comité, notre première année s’est soldée avec un actif de L.I.3611, 96. Dès l’enregistrement de l’Ecole, nous avons pu avoir un contre-courant en L.I. au nom de l’Ecole, ce qui fut fait le 8 octobre 1968.Le Comité de Gestion travaillant dans l’unité avait décidé qu’il suffirait d’une seule de nos signatures pour qu’un chèque soit honoré. Je pense à présent que, afin d’éviter des décision arbitraires, il serait préférable de requérir deux signatures.
En 1968, le franc venait d’être dévalué et je ne voulais pas perdre le bénéfice de la subvention. Aussi avons- nous ouvert en France un comte-courant en francs français, ce qui nous permet de régler les factures de Prolecteur ou de faire des versement au profit des professeurs.
En septembre 1972, nous avons ouvert un compte-dépôt, car nous avions parfois de la difficulté à faire honorer nos factures, et il m’est arrivé, à plusieurs reprises, d’avoir à faire intervenir le pays du débiteur pour obtenir les paiements dus. Le compte-dépôt, placé par tranches de 6 mois, nous rapporte un intérêt de 12¿?, sur lequel j’ai obtenu de ne pas payer de taxes. Le produit de ces intérêts, de même que celui des cours d’après-midi (qui sont des activités extra-scolaires), n’entraient pas dans le budget annuel : cela nous permettait de constituer une réserve pour faire face à un coup dur (comme celui qui nous est arrivé au premier trimestre 73-74 avec le départ des africains, nous obligeant à licencier du personnel) et de créer ultérieurement un fonds de licenciement et de retraite au profit de nos professeurs à plein temps.
À ces trois différents comptes il faut ajouter un petit compte-en-dollars qui nous permet, le cas échéant, de faire par Layam – par l’intermédiaire du Consulat de France – une commande de matériel, ou d’avancer à un professeur l’argent d’un voyage.
Quand j’ai quitté mon poste d’administrateur le 31 janvier 1974, à la demande du Consulat, tous ces comptes étaient créditeurs, et la marge de sécurité que je m’étais imposée était largement observée. Elle s’est avérée être indispensable pour pouvoir payer les professeurs jusqu’à l’arrivée de la subvention.

5-L’ADMINISTRATION et le COMPTE DE GESTION.
Élue Présidente du Comité de Gestion en 1967, j’y suis demeurée jusqu’en octobre 73. Mes collaboratrices ont été successivement :
-Mme Noël de U.N.T.S.O. et Mme André du Consulat de France
-Mme Amuah de l’Ambassade de Côte d’Ivoire et Mme Campenet de U.N.T.S.O.
-Mme Campenet et Mme Cervino du Consulat d’Espagne.
Nos dossiers s’établirent rapidement :
-cahiers de compte depuis le premier jour avec pièces justificatives numérotées.
-dossiers correspondance ( arrivée avec cahier d’enregistrement
( départ ‘’ ‘’ ‘’ -dossiers des enseignants( ceux en poste)
( les autres : ex-enseignants et demande de poste) -dossier factures avec reçus
-dossier inventaire
-catalogue de livres pour bibliothèque du cours élémentaire du ‘’ moyen du secondaire
-fiches comptables des élèves
-fiches médicales des élèves
-fiches de livres et fiches d’auteur.

En octobre 73, Monsieur Henry, Consul Général de France, m’a demandé que Monsieur Firmand, son nouvel adjoint, fasse partie du Comité, ce qui fut fait. Pour parachever cette élection, nous avons décidé de lui donner la Présidence du Comité, qu’il entend depuis gérer seul. Pendant les trois premières années, les membres du Comité de Gestion ont travaillé de façon entièrement bénévole, mettant à la disposition de l’École leur travail, leur énergie, leur temps, leur voiture, leur téléphone et leur patience. Ma famille et moi-même avons bien souvent peint les murs, les portes et les bancs de l’École. L’École s’agrandissant, le travail est devenu de plus en plus prenant, et il fut décidé en Comité de Gestion, la quatrième année, que les deux membres principaux recevraient L .I. 275 par mois pendant 10 mois et le troisième L.I. 50. La cinquième année, Mme Amuah ayant quitté, j’ai reçu L.I. 275 par mois pendant un peu moins de 8 mois, une secrétaire me secondant avait quelques heures de travail par mois. La sixième année, j’ai reçu L.I. 8324 pour l’année ce qui correspondait au salaire d’une institutrice avec un mois de congé seulement pour dix mois de travail.

La septième année s’est vue interrompue dès le départ des africains, le Consulat de France ayant décidé de prendre la gestion de l’École.


Fait à Jérusalem le 8 juillet 1974>>